La tempête est une peinture à l’huile sur toile du peintre italien Giorgione, datée entre 1506 et 1508. Elle représente une scène mystérieuse où une femme allaitant un enfant et un homme tenant un bâton se font face dans un paysage orageux. Elle mesure 82 x 73 cm et est conservée aux Gallerie dell’Accademia de Venise en Italie. Elle appartient au courant de la Renaissance vénitienne, qui se caractérise par la maîtrise de la couleur et de la lumière.
Contexte historique de l’œuvre
La tempête est l’une des rares œuvres attribuées à Giorgione, un peintre dont la vie et l’œuvre sont entourées de mystère. Il serait né vers 1478 à Castelfranco Veneto et mort en 1510 à Venise. Il aurait été l’élève de Giovanni Bellini et le maître du Titien. Il aurait été influencé par l’art flamand et l’art antique. Il aurait été un peintre novateur et original, qui aurait créé le genre du paysage poétique.
La tempête a été mentionnée pour la première fois en 1530 par Marcantonio Michiel, un amateur d’art vénitien, qui l’a décrite comme « le paysage avec l’orage, la gitane et le soldat (…) de la main de Zorzi de Castelfranco ». Il l’a vue dans la maison de Gabriele Vendramin, un riche collectionneur qui possédait plusieurs tableaux de Giorgione. On ignore qui était le commanditaire original du tableau et quelle était sa signification.
La tempête a été ensuite transmise à plusieurs propriétaires avant d’être acquise par les Gallerie dell’Accademia en 1812. Elle a été restaurée à plusieurs reprises et a subi des modifications au fil du temps. Elle a été l’objet de nombreuses interprétations et controverses parmi les historiens de l’art.
Analyse du tableau
Le tableau représente une scène énigmatique où deux personnages humains se font face dans un paysage agité par une tempête. La composition est organisée selon une diagonale descendante qui va du coin supérieur gauche au coin inférieur droit.
- Au premier plan, on voit une femme assise sur le sol, qui allaite un enfant. Elle est vêtue d’une robe blanche qui laisse voir sa poitrine et son épaule. Elle porte des bijoux aux oreilles, au cou et aux bras. Elle regarde fixement le spectateur avec une expression indéfinissable.
- Au second plan, on voit un homme debout sur une rive, qui tient un bâton dans sa main droite. Il est vêtu d’une tunique rouge. Il regarde vers la gauche avec une attitude interrogative.
- Au troisième plan, on voit le paysage qui occupe la majeure partie du tableau. On distingue une ville fortifiée sur la rive opposée, où se dressent des tours et des clochers. On aperçoit aussi un pont qui enjambe un cours d’eau. On remarque également des arbres dénudés par le vent et des ruines antiques qui évoquent la fragilité de la civilisation.
- Au dernier plan, on voit le ciel sombre qui contraste avec la lumière dorée qui illumine la scène. On observe des nuages menaçants qui annoncent l’orage. On distingue aussi un éclair qui zèbre l’horizon.
La palette du tableau est riche et contrastée : elle mêle les tons chauds (rouge, orange, jaune) et les tons froids (bleu, vert). Giorgione utilise la technique de l’huile sur toile pour créer des effets de transparence et de luminosité qui renforcent le réalisme et la poésie du paysage. Il soigne également les détails des personnages, des animaux et des végétaux qui témoignent de son observation attentive et de son imagination créative.
Interprétation
La tempête est une œuvre typique du style vénitien qui se caractérise par la beauté sensuelle et raffinée de la forme. Giorgione exprime sa vision personnelle du paysage en mettant en scène une scène mystérieuse et suggestive.
Giorgione ne cherche pas à illustrer fidèlement un récit ou à transmettre un message précis. Il s’inspire plutôt librement de sources diverses pour créer une œuvre originale et ambiguë. Il souligne ainsi le contraste entre la nature sauvage et la culture humaine ; entre le calme apparent et le tumulte latent ; entre le profane et le sacré.
Giorgione s’adresse aussi à son commanditaire et à son public cultivé qui apprécient les références savantes et les allusions symboliques. Il évoque ainsi sa connaissance de l’art antique et de l’art contemporain ; son admiration pour les maîtres italiens et flamands ; son goût pour les thèmes mythologiques et philosophiques.
La tempête est donc une œuvre remarquable par sa technique et son expressivité. C’est aussi une œuvre énigmatique qui défie toute interprétation définitive et qui stimule l’imagination du spectateur.